La renonciation à la clause de non-concurrence
1. La possibilité de renonciation à la clause de non-concurrence
La première question qui se pose est celle de savoir si l'employeur peut lever la clause de non-concurrence en cas de silence du contrat sur ce point.
Pour la Cour de cassation (Cass. soc. 22 septembre 2010, n° 09-41635), l'employeur ne saurait renoncer unilatéralement à la clause de non-concurrence, dès lors qu'une telle faculté n'est pas prévue dans le contrat de travail ou la convention collective applicable.
En d'autres termes, la faculté de renonciation à la clause de non-concurrence doit être prévue soit par le contrat, soit au moins par la convention collective (Cass. soc. 22 février 2006, n° 04-45406).
Cette dernière ne permet parfois pas à l'employeur de se réserver la possibilité de lever la clause de non-concurrence.
Ainsi, en présence de dispositions conventionnelles prévoyant que la clause de non-concurrence peut à tout moment être résiliée à la suite d'un accord entre les deux parties, l'employeur ne peut renoncer à cette clause de façon unilatérale (Cass. soc. 26 mars 2003, n° 01-41439)
Enfin, rien n'empêche les parties de convenir d'une clause de non-concurrence qui n'était pas initialement prévue au contrat de travail, soit dans un avenant au contrat de travail, soit par convention distincte après la rupture du contrat.
2. Le nécessaire délai de renonciation à la clause de non-concurrence
La jurisprudence n'admet pas les dispositions par lesquelles l'employeur se réserve le droit de mettre fin, sans délai, à une clause de non-concurrence.
Pour la Cour de cassation, le salarié ne pouvant être laissé dans l'incertitude quant à l'étendue de sa liberté de travailler, la clause par laquelle l'employeur se réserve la faculté, après la rupture du contrat de travail, de renoncer à la clause de non-concurrence à tout moment au cours de l'exécution de celle-ci doit être réputée non écrite (Cass. soc. 13 juillet 2010, n° 09-41626).
En conséquence, en l'absence de disposition conventionnelle ou contractuelle fixant valablement le délai de renonciation par l'employeur à la clause de non-concurrence, celui-ci ne peut être dispensé de verser la contrepartie financière que s'il libère le salarié de son obligation de non-concurrence au moment du licenciement.
Antérieurement, la Cour de cassation jugeait que l'employeur pouvait renoncer à la clause de non-concurrence « dans un délai raisonnable » (Cass. soc. 13 juin 2007 n° 04-42740).
3. Le point de départ du délai de renonciation à la clause de non-concurrence
Le point de départ du délai dans lequel la clause de non-concurrence peut être levée varie notamment selon le mode de rupture du contrat de travail et les précisions de la clause.
3.1. En cas de précision de la clause
Le contrat ou la convention collective applicable peuvent déterminer le délai dans lequel l’employeur peut renoncer à la clause de non-concurrence, et celui-ci doit alors être respecté.
Si le principe est clair, ses contours nécessitent toutefois une interprétation.
Ainsi, en présence d’une clause de non-concurrence prévoyant que l’employeur peut en libérer le salarié dans un certain délai « suivant la notification de la rupture du contrat de travail », le point de départ de la renonciation est la date d'envoi de la lettre de la notification de la rupture du contrat (Cass. soc. 30 mars 2011, n° 09-41583 pour le licenciement ; Cass. soc. 27 février 2001, n° 99-40436 pour la démission).
Cette solution est logique puisque la date de notification de la rupture est matérialisée par la lettre selon laquelle l’une ou l’autre des parties rompt le contrat, et non par la date d’expiration du préavis, à laquelle le contrat prend définitivement fin.
En revanche, en cas de rupture conventionnelle, le point de départ du délai de renonciation à la clause de non-concurrence est la date de rupture prévue dans la convention de rupture et non la date de signature de la rupture conventionnelle (Cass. soc. 29 janvier 2014, n° 12-22116).
Bien entendu, les solutions susvisées sont valables sauf si le contrat ou la convention collective en disposent autrement.
Par exemple, le contrat de travail peut tout à fait autoriser l’employeur à lever la clause de non-concurrence dans les 15 jours de la fin du contrat de travail, qui correspond alors à l’expiration du préavis exécuté ou non.
Précisons, enfin, que la date de renonciation à la clause de non-concurrence correspond à la date d'envoi de la lettre (Cass. soc. 10 juillet 2013, n° 12-14080).
3.2. En l’absence de précision de la clause
Le contrat et/ou la convention collective sont parfois imprécis sur la question de la levée de la clause de non-concurrence, ce qui a conduit la jurisprudence à faire œuvre prétorienne.
En cas de licenciement, la solution diffère selon que le salarié est ou non dispensé d'exécuter son préavis.
Dans la première hypothèse, la renonciation doit intervenir au moment du licenciement du salarié pour lui permettre, le cas échéant, d'entrer, pendant le préavis dont il est dispensé, au service d'une entreprise concurrente (Cass. soc. 16 mai 1990, n° 87-40904).
Dans la seconde hypothèse, la renonciation doit intervenir dès la fin du préavis, à défaut de quoi l'employeur est tenu au versement de l'indemnité compensatrice (Cass. soc. 4 décembre 1991, n° 90-40309).
Les solutions sont identiques en cas de démission, la Cour de cassation jugeant que lorsque les modalités de la renonciation de l'employeur au bénéfice de la clause de non-concurrence ne sont fixées ni par le contrat de travail ni par la convention collective, cette renonciation doit intervenir dès la fin du préavis de démission (Cass. soc. 8 janvier 1969 n° 68-40049).
Enfin, le délai pendant lequel l'employeur peut dispenser le salarié de l'exécution de la clause de non-concurrence court, lorsque celui-ci a pris acte de la rupture de son contrat de travail, à compter de la réception par l'employeur de la notification de la lettre de prise d'acte (Cass. soc. 25 mars 2010, n° 08-42302).
Xavier Berjot
Avocat Associé
OCEAN Avocats
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